en résidence du 8 au 14 février, du 1er au 7 mars 2021 et du 14 au 21 novembre 2022
SOLA GRATIA
Le 3 septembre 2020, à Bordeaux, vers 1h30 du matin, un jeune homme nous a poignardé mon compagnon et moi en criant : «sales pd». Il a planté son couteau dans l’épaule de mon compagnon et m’a tranché le visage. Ce coup est venu ouvrir une plaie bien plus profonde. Ça a été comme le premier domino qui a renversé, dans un fracas assourdissant, tout les dominos de souffrances que j’avais accumulé pendant les trente premières années de ma vie. J’ai su immédiatement qu’il fallait que je trouve en moi la force un peu absurde du cavalier qui le pousse à remonter tout de suite sur son cheval après qu’il en a chuté. Je me suis mis à écrire. Avec ce besoin impérieux de prendre le plateau pour exorciser la souffrance. Dire le mal, crier l’injustice, partager la peine. Mais en même temps s’est posé la question de la mise en forme de ce dé-sir. L’artiste peut-il, doit-il, se servir de ses traumas comme d’une matière à œuvre ?
Dès lors que la violence est mise en scène, même si nous la critiquons, ne la cautionnons nous pas ? Y a-t-il une déontologie de l’artiste ? Suis je légitime à prendre des gens à témoins de ma souffrance, pourquoi moi plus qu’un autre? Et comment mettre en scène cette violence ? En l’incarnant, en la désincarnant, en la mettant en distance ou en l’exposant ? Faut il avoir recours à la fiction ou au contraire être scrupuleusement fidèle à la réalité ? Autant de questions que j’essaie de poser en retraçant à rebours mon expérience de la violence à travers des dates clefs et en travaillant sur des mises en scènes spécifiques pour chaque date qui me permettent d’entamer un dialogue avec le spectateur sur la relation entre art et violence, entre douleur personnelle et esthétisation de cette violence. Ce solo c’est la tentative d’une forme essentiellement politique qui se questionne sur elle-même. Qui s’affirme en doutant. C’est la peinture intime d’un combat avec soi-même, complexe et ambiguë. C’est aussi le récit sincère et sans filtre d’un garçon qui en a bavé et qui a besoin de lâcher du leste pour ne pas s’écraser.
Yacine Sif El Islam, Bordeaux, octobre 2020.
Contact : yacine.sif@gmail.com
«Avec SOLA GRATIA, je poursuis une route qui depuis ma sortie de l’école, il y a une dizaine d’années, m’a conduit vers un travail qui s’affranchit de plus en plus des frontières entre théâtre et danse et performance et art plastique; quelque chose qui, chemin faisant, s’affirme en affirmant de moins en moins, qui trouve sa vérité et sa nécessité en l’absence d’une identité fixe et de discours assurés.
Mon travail laisse la place au doute, à l’imperfection, au « que sais-je? « qui nous fait humains. Dans la suite de ma précédente performance, THE WAY YOU SEE ME, je poursuis une réflexion autour du corps et de l’identité, de la représentation sociale et des projections, où se mêlent clichés et préjugés, que chacun fait sur le corps de l’autre.
Je voudrais qu’il soit un instant où le brouhaha incessant du temps s’arrête, une occasion de respirer tout l’air qui nous manque tant; de prendre le temps, et le risque, ensemble, de partir à la rencontre de ce que l’on ne connaît pas, de soi, de l’autre et peut être d’autre chose.»
Yacine Sif El Islam
Après l’option-théâtre au lycée de Salins-les-bains (Jura), puis le DEUST à l’Université de Besançon, il intègre l’ESTBA en 2010, pour 3 ans.
Intéressé depuis toujours par la mise en scène il a dirigé toutes les créations du Groupe Apache : en 2013, Le Misanthrope, qui sera joué dans divers lieux non théâtraux (fermes, église, chantier naval), de 2015 à 2017, le Projet/Molière d’après Le Misanthrope, Dom Juan et Tartuffe, joué à la Manufacture Atlantique de Bordeaux, puis en 2017, Sodome et Gomorrhe de M. Proust, toujours à la Manufacture Atlantique, et Spartoï, une pièce mythologique de science fiction, écrite par Jules Sagot et jouée à Bordeaux dans le cadre du FAB, en coproduction avec le TnBA et le CDCN de Bordeaux.
En 2019, Yacine Sif El Islam créé la performance The way you see me, dans le cadre du FAB au TnBA puis Après avoir joué Actéon aux Beaux-arts de Bordeaux dans le cadre du festival 30/30
Chemin faisant, à la faveur d’un aller-retour permanent entre textes classiques et contemporains, Yacine Sif El Islam, axe sa recherche artistique sur l’articulation entre une réflexion existentielle et politique, sur le rapport de l’Homme à sa propre violence, et une recherche formelle autour des notions de “spectacle”, d’”interprétation” et de “spectateur”.
Yacine Sif El Islam est aussi comédien, notamment pour Catherine Marnas, Julien Duval, Sandrine Anglade ou Yves Noël Genod.
Sophie Dales
Après son DEC au Conservatoire de Bordeaux, Sophie Dalès s’installe à Montréal où elle devient la danseuse-collaboratrice du chorégraphe Dave Saint- Pierre pour « La Pornographie des âmes » et « Un peu de tendresse bordel de merde ». Elle est interprète et découvre le travail de multiples personnes comme Maureen Shea et Valérie Buddle. Elle se forme continuellement auprès de gens comme Alain Francoeur, Marc Boivin, Jamie Wright et tant d’autres auprès du Regroupement Québécois de la Danse, elle entame des études supérieures en Danse à l’UQUAM.
Elle débute son travail de chorégraphe en collaboration avec Francis Ducharme à Tangente (Montréal) sur la pièce « Celui qui aime est à Dachau » ainsi qu’avec BenRead sur « Le poulet contre la société ». Sa carrière l’emmène à Bruxelles vers Morena Prats metteuse en scène, elle se forme en parallèle à la danse des Slovaques et en Feldenkrais auprès de Meytal Blanaru.
Elle finira par fonder sa propre compagnie WOLF en débutant son travail de collaboration avec la danseuse Clara Furey de chez Benoit Lachambre
(Montréal). Sophie Dalès a collaboré pendant 5 ans au sein du collectif a.a.O, dans lequel elle co-chorégraphie « 2°de liberté suffisent » ; «Sublimis » ainsi que collaboratrice artistique de Carole Vergne et artistique chorégraphique sur « En Stock ».
En 2020, elle est invitée à présenter son travail de création « Syntuitive» lors du Festival Trente Trente à Bordeaux en collaboration avec l’école des
Beaux-arts sous le parrainnage de Annabelle Chambon et Cédric Charon. Sophie Dalès s’illustre en tant que chorégraphe de la scène Bordelaise
émergente en recherche d’un art total qui s’inspire de l’art contemporain et du métissage culturel et pluridisciplinaire. Le paysage Bordelais se voit revêtir les couleurs du mouvement évolutif Belge et de l’anticonformisme Canadien.
Benjamin Yousfi
Après des études de stylisme et d’histoire de la mode à IBSM, ESMOD et un BTS métiers de la mode et du vêtement, Benjamin Yousfi s’orriente dans un premier temps sur la rédaction de chroniques de mode pour les magazines spécialisés. En 2014 il décide de travailler avec Luc Cognet pour Que sont nos avenirs devenus ? écrit par Adeline David, suvi par la présentation de sa première collection. En 2019, Benjamin Yousfi devient consultant et costumier et collabore avec Yacine Sif El Islam sur The Way you see me dans le cadre du FAB ( Festival international des arts de Bordeaux) et Après avoir joué Actéon dans le cadre du festival 30/30. En parallèle, il prépare une exposition autour du visible et de l’invisible par le biais du vêtement, de la photographie et de la performance, et dont sont extraites les photographies présentes dans ce dossier.