Myriam Lefkowitz - danse • La Métive

en résidence du 15 au 25 juin 2022

The Book Club

conception: Myriam Lefkowitz et Cécile Lavergne
en collaboration avec Jean-Philippe Derail, Thierry Grapotte, Julie Laporte, Florian Richaud, Yasmina Youcef
en discussion avec Igor Krtolica

The Book Club repose sur deux postulats :

C’est une pratique qui spécule sur des associations inédites entre les facultés de penser, sentir, imaginer, se rappeler, rêver…ou comment s’inventer des manières de sentir et d’imaginer dont on ignore encore à peu près tout et qu’il s’agirait d’exercer pour en éprouver la puissance.

À partir de ce présupposé , la question que nous nous sommes posée est la suivante : comment fabriquer une pratique de lecture de texte philosophiques qui reposerait sur ces nouveaux cheminements ?

Ou formuler autrement : comment expérimenter – via les corps et les imaginaires dont nous disposons à ce jour – de nouveaux cheminements entre nos dîtes facultés et mettre en jeu ce que penser pourrait bien vouloir dire.

C’est un jeu avec la lecture qui tente de prendre l’invitation de la philosophe et biologiste Donna Harraway à la lettre : lorsqu’elle nous encourage vivement à fabuler (action définit comme suit : présenter comme réel des faits imaginés) afin de s’inventer de nouveaux récits sur le monde qui vient, que dit-elle ? Pourrait-on s’inventer un outil de fabulation qui nous permettrait de penser et de panser ce qui nous arrive?

Rassemblant un corpus de textes philosophiques mettant tous en jeu des alliances spécifiques entre humains et non humains (animaux, plantes, objets, esprits…) chaque texte décrit des modalités de compagnonnages et d’interactions qui mettent en cause la centralité du sujet “humain” et imaginent ainsi la forme de la communauté que nous pourrions devenir à la condition de céder au décentrement.*

La première version du The Book Club a été initiée à If I Can’t Dance I Don’t Want To Be Part of Your Revolution (Amsterdam) en 2019. Elle se pratique en duo : un·e danseu·r.se et un·e visiteu·r·se. Celui-ci ou celle-ci est invité·e à s’allonger et à fermer les yeux. la lecture dure environ 1h. L’adresse au·à la visiteu·r·se alternera entre deux formes : la lecture à voix basse et différentes qualités de touchers allant du très minimal au corps à corps.

La deuxième version du The Book Club a été initiée au centre d’art et de recherche Bétonsalon (Paris) en 2021. Également en duo, le·la visiteu·r·se est invité·e à s’allonger et à fermer les yeux. le·la danseu·r.se est assise ou allongé·e à côté d’elle ou de lui. Pendant l’heure que dure l’expérience, un dialogue guidé par le·la danseu·r.se va prendre forme. Un dialogue qui engage à un glissement dans un état modifié d’attention. Proche de l’hypnose, cet état permet de parler comme suspendu.e.s entre le rêve et la veille.

Ces deux versions invitent à la fabulation (l’une via le corpus de sensation et d’images qui s’engagent dans le toucher l’autre via le dialogue parlé) dans le sens où elles favorisent les apparitions d’images, de signes, d’idées, de sensations, d’espaces…Tentant d’échapper au contrôle de la cohérence ou de la logique, elles autoriseraient à prendre pour réel des faits inventer.

Dans un premier temps, la recherche à la Métive permettrait de prolonger le travail déjà engagé sur ces deux formes de lecture via l’induction ou dans le corps à corps. Ainsi, et selon ce que les textes demandent, nous tenterons de fabriquer des nouvelles partitions de lectures (via le toucher ou la parole).

Dans un deuxième temps il s’agira de définir des outils qui permettraient de mettre en commun les images, sensations, perceptions, mémoires… générées par la pratique, insistant ainsi sur la dimension collective de cette activité et des apparitions qu’elle favorise. Dépassant ainsi l’expérience individuelle, l’enjeu consisterait ici à ouvrir la discussion, par associations ou dissonances, pour tenter de lire ensemble ce que cette pensée née dans les corps peut faire.

*Jean-Philippe Derail, Thierry Grapotte, Julie Laporte, Myriam Lefkowitz, Florian Richaud, Yasmine Youcef, Elisa Yvelin

Jean Philippe Derail, Et sait-on jamais dans une obscurité pareille, La Galerie, Noisy-le-Sec, 2018

Artiste chorégraphique, Myriam Lefkowitz focalise sa recherche depuis 2010 sur les questions d’attention et de perception, à travers différents dispositifs immersifs impliquant des relations directes entre spectateurs et artistes. Son travail a été présenté à la 55ème biennale de Venise (« Oo », Pavillon lituanien et chypriote), au CAC Vilnius, à Med15 (Medellin), à Garage (Moscou), au Creative Time Summit (Stockholm), à Situations (Bristol), à la Talbot Rice Gallery (Edinbourg), à la Fondation Kadist (Tokyo et San Francisco), au Kaaitheater (Bruxelles), aux Laboratoires d’Aubervilliers, au festival Szene (Salzburg), à la Ferme du Buisson… Après avoir été étudiante à SPEAP (master d’expérimentation en art et politique, Science Po Paris, fondé par Bruno Latour) en 2011, elle devient membre du comité pédagogique pendant deux ans. Très attachée à l’enseignement, elle est régulièrement invitée par différentes écoles d’art et de danse (HEAD, Mejen à Stockholm, aux Beaux Arts de Reims, Besançon, Quimper, au master Ex.Erce, au département danse de Paris 8…) Entre 2017 et 2018, elle est une des artistes invitée par If I Can’t Dance I Don’t Want To Be Part Of Your Revolution (Amsterdam). Actuellement, elle travaille à la réalisation d’un film en collaboration avec l’artiste Simon Ripoll-Hurier, elle enseigne à TALM (Angers) et poursuit sa recherche chorégraphique dans le cadre de la facultad, un projet au long cours conçu avec la chorégraphe Catalina Insignares en collaboration avec l’artiste chorégraphique Julie Laporte qui se déploie au centre d’hébergement d’urgence pour personnes en situation d’exil d’Ivry, soutenu par le centre d’art et de recherche Bétonsalon.